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Roumanie - Italie (détail)

Gheorghe Hagi ne veut pas partir tout de suite
P>Le meneur de jeu roumain va disputer son 125e match international

HEYSEL "Ils m'ont offert un cadeau royal. Ils sont doués, ces jeunes. Ils sont capables de très bien jouer, même sans moi. Je les aime..."

Gheorghe Hagi capture son auditoire dans un regard de prédateur. Même lorsqu'il plaisante, même si son crâne rasé lui confère un petit cachet espiègle, même si son sourire éclatant dévoile une dentition parfaite, il dégage la prestance froide d'un imperator.

Le maestro de la sélection roumaine - sa maman désirait qu'il prît des cours de musique - s'est engagé le dernier dans le long boyau tortueux qui délimite la mixed zone. Il s'y est attardé, happé par les journalistes italiens qui l'abordent toujours avec déférence. Il s'est campé devant eux, bien droit. Gheorghe Hagi ne fait jamais l'aumône d'une interview. Il accorde des audiences. En anglais, en italien, en roumain. Ce globe-trotter devenu polyglotte se perd rarement dans des faux-fuyants sibyllins: ses propos claquent comme des sentences. Il les assene comme autant d'oracles, en se moquant de leurs répercussions éventuelles.

"Plus rapides et plus intelligents"

Vendredi, dans la tente de presse du stade Roi Baudouin, Gheorghe Hagi était d'excellente humeur. Tout en répondant aux questions, il ne cessait de se frotter les mains d'un petit air gourmand. Il avait, manifestement, hâte de s'y plonger déjà, dans ce quart de finale de Championnat d'Europe historique pour la sélection de son pays.

A trente-cinq ans accomplis, il se prépare en effet à vivre un nouvel authentique événement lui qui, en 1994 aux Etats-Unis, lors de sa campagne internationale la plus accomplie, avait déjà mené la Roumanie en quart de finale de la World Cup, son fait d'arme le plus méritoire: jamais encore dans une épreuve limitée aux nations du vieux continent, l'équipe roumaine n'avait atteint ce stade de la compétition.

"Ce que mes équipiers ont réalisé sans moi, mardi soir à Charleroi, constitue une réelle prouesse, apprécie-t-il encore. Je les ai, sincèrement, admirés. Ils ont disputé le match parfait. Leur prestation fut brillante mais elle sert pas de référence pour préparer la confrontation de ce soir avec l'Italie: le contexte tactique sera tout autre."

Gheorghe Hagi entend imprimer sa griffe sur ce quart de finale. Non pour réaffirmer sa préséance: il se sait, toujours, intouchable sinon omnipotent dans une sélection dont, avec les autres anciens Petrescu et Popescu, il définit toujours les lignes de force. Mais parce que cet Euro lui plait et qu'il a très envie de faire durer son plaisir. Parce qu'il sait qu'il dispute là l'ultime grand tournoi d'une carrière somptueuse, à laquelle ses trop nombreuses sautes d'humeur, toujours imprévisibles, ont hâché de quelques hiatus. Renoncera-t-il à une sélection ultérieure en cas d'élimination?

La question, inévitable, ne l'a même pas irrité. Il l'a balayée d'un revers de manche presque désinvolte:

"Je ne pense pas que je disputerai ce soir le dernier match de ma carrière. Il sera le 125e de mon histoire. C'est un beau chiffre, presque rond. Mais si je n'ambitionne pas de battre un jour de record de Matthaus - je devrais encore en jouer... vingt-six! - je me sens encore trop en forme, trop influent sur le jeu pour m'arrêter déjà. Je suis satisfait de la saison que j'ai livrée avec Galatasaray "

Gheorghe Hagi n'entend pas s'arrêter, également, parce que cette équipe roumaine, qui se renouvelle subtilement, par petites touches inspirées, le ravit: "Hagi en demeure le leader incontesté, presque le gourou, confirme un membre de l'entourage immédiat. Gheorghe ne recèle plus des ressources physiques inépuisables mais son impact psychologique reste énorme. Personne mieux que lui ne parvient à motiver les jeunes éléments doués que sont Chivu, Mutu et les autres."

La cure de jouvence à laquelle il s'est volontairement soumis semble avoir limé le caractère, naguère irascible, de ce magicien hyper doué du ballon. Gheorghe était égoïste: il est devenu presque altruiste. Il est resté naturellement doué mais il a combattu la nonchalance bougonne qui le faisait, parfois, brosser certains rendez-vous. Parce qu'il continue d'étaler sa science du jeu offensif, Gheorghe Hagi demeure un phénomène du ballon rond.

"Les Italiens n'ont pas inventé le football mais ils n'ont plus rien à apprendre. Pour les battre, nous devrons nous révéler plus rapides et plus intelligents qu'eux. J'entends bien que nous y parvenions. Et avant les tirs au but, encore bien..."

Gheorghe Hagi a tout dit. "Basta?", s'enquiert-il, par acquit de conscience. Il s'en va enfin. Vers un nouveau destin.

Michel Dubois

Avant Le Match
Francesco Totti aux portes de l'histoire (suite)
Gheorghe Hagi ne veut pas partir tout de suite (suite)
LES NOYAUX (suite)
Après Le Match
L'Italie élimine la Roumanie en jouant... à l'italienne! (suite)
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